Kofi Gyimah « Le volley et la musique sont les deux composantes complémentaires de ma vie »

Interview

Kofi Gyimah « Le volley et la musique sont les deux composantes complémentaires de ma vie »

Il fait partie des meilleurs contreurs du championnat avec son style spectaculaire. Mais le numéro #16 sétois, en plus d’être un sportif de haut niveau, est un artiste accompli dans la musique. La sortie de son nouvel album PettyBoy a été l’occasion de le rencontrer pour parler musique… et volley.

Bonjour Kofi, on sait que tu es originaire de Toronto, mais peux-tu nous en dire plus sur toi ?

Oui, ma mère est canadienne et a grandi à Toronto mais mes grands-parents étaient polonais et mon père est originaire de Kumassi au Ghana.

Je viens de Scarborough qui est une ville de l’agglomération de Toronto mais avant de devenir professionnel de volley, je vivais principalement à Los Angeles.

“Venant de Toronto, c’est difficile de ne pas être influencé par Drake.”

On sait que tu as la particularité de faire du volley, mais aussi de la musique. Commençons par la musique, quelles sont tes influences musicales ?

Venant de Toronto, c’est difficile de ne pas être inspiré par Drake. Mais plus jeune, j’aimais bien Akon et un certain nombre d’artistes d’afrobeats et des artistes ghanéens également.

Tu me parles de Drake, c’est un artiste de musique majeur, mais également quelqu’un qui s’est impliqué dans le sport notamment dans la franchise NBA des Toronto Raptors, est ce que c’est quelque chose qui t’a inspiré de mêler, finalement, sport et musique ?

Évidemment, oui Drake a toujours été intéressé par le sport, il a même joué au volley-ball ! J’ai des amis qui ont joué au volley avec lui.

Et toi, tu aimes d’autres disciplines sportives ?

J’aime bien pas mal de sports, mais je regarde surtout les sports de combat de type MMA.

Tu viens de sortir un nouvel album, son nom est « Petty boy », peux-tu nous parler du choix de ce nom ?

En anglais être « petty », c’est être puéril, parler beaucoup et ne pas te comporter comme tu le devrais.

Être petty, ce n’est pas comme je suis actuellement, mais c’est comme j’ai pu être dans une relation passée. Dans cet album j’ai quelque part voulu exprimer tout ce que je n’avais pas dit et aurais dû dire mais également parler des choses que je n’avais pas fait mais que j’aurais dû faire.

Écouter l'album "Pretty Boy"

 

C’est un message que tu veux faire passer à ceux qui vont t’écouter ?

Oui, j’ai reçu pas mal de messages de personnes que ma musique avait aidé. Peut-être que des gens sont dans une mauvaise relation et l’idée c’est un peu de leur dire « c’est ta propre vie, fais quelque chose ». Par exemple, dans la chanson « I got options too », l’idée c’est basiquement d’expliquer comment tu peux être dans une relation toxique avec quelqu’un qui te dévalue.

Ces situations, c’est un sujet qui est souvent mis en avant ou évoqué dans ton entourage ?

Je pense que cela concerne tout le monde, mais je l’ai écrit en m’appuyant sur ma vie et celle de mes amis, des personnes que je connais ou des choses que j’ai vues.

Mon album, « Pettyboy » c’est une fenêtre ouverte sur la culture musicale de Toronto.

Comment pourrais-tu définir le style de cet album ?

Habituellement, je fais des albums qui se situent entre le RNB et l’afrobeats mais dans celui-ci je voulais que ce soit un album de hip hop, avec pas mal de rap, mais il possède également des éléments de RNB et d’afrobeats.

Où peut-on l’écouter ?

Il est disponible sur toutes les plateformes de streaming et il est sorti à la mi-novembre.

Revenons au volley, peux-tu nous parler de ton parcours en tant qu’athlète ?

J’ai joué à quasiment tous les sports auxquels tu peux jouer au Canada comme le hockey sur glace, où je n’étais pas mauvais.

Tu aurais pu être le futur PK Suban (star de hockey professionnel originaire de Scarborough comme Kofi) ?

Ha, ha ! Peut-être ! Devante Smith Pelly qui a joué en NHL et a remporté la Coupe Stanley est le frère de l’un de mes meilleurs amis. À Toronto, quand tu es bon au hockey, c’est assez courant de devenir joueur professionnel en NHL.

Après j’ai joué au football (soccer), au base-ball et j’ai même fait de la course de fond jusqu’à mes 15 ans, mais après j’ai arrêté. Ce n’était pas très fun : tu t’entraînes, tu rentres fatigué et tu n’as pas vraiment d’échanges avec qui que ce soit après l’entraînement car tu es épuisé.

À peu près au même moment, j’ai rencontré un entraîneur et une équipe de volley où jouer et je crois que c’est la plus belle chose que j’ai vécue. Cet entraîneur avait 21 ans quand il avait commencé à nous entraîner et il a construit quelque chose de parfait au niveau de notre groupe, de son entourage.

Il avait construit une culture d’équipe parfaite. Pas grand monde n’avait joué au volley avant et nous sommes devenus un groupe très uni, très concentré qui nous a permis de faire de choses de très haut niveau.

Personnellement j’étais nul au début et il m’a permis d’avoir quasiment le niveau que j’ai aujourd’hui.

J’ai énormément progressé en 4 ans avec lui puis je suis passé au niveau suivant à l’université et UCLA qui avait pour entraîneur John Speraw, le sélectionneur de l’équipe des Etats-Unis.

On sent que tu as été marqué par cette première expérience, comment s’appelait cet entraîneur et cette équipe ?

Le club c’était les Scarborough Titans, mais chaque équipe avait un nom, et le nom de notre équipe était les Némésis. L’entraîneur dont je t’ai parlé est Bryan Singh. Maintenant, il forme des entraîneurs de volley et produit l’un des plus importants podcasts de volley du monde.

Après les Titans tu arrives à UCLA donc, parle nous de cette expérience. Pourquoi l’université de UCLA ?

J’ai choisi UCLA pour plusieurs raisons. D’abord, parce que j’avais envie d’aller vivre aux Etats-Unis. Là-bas, j’avais la possibilité d’aller dans plusieurs universités, à la fin mon choix s’est fait entre USC (University of South California) et UCLA les deux universités étaient dans Los Angeles. Mais UCLA avait John Speraw, l’entraîneur de la sélection US, comme entraîneur et si tu veux jouer à un niveau supérieur, c’était la seule option car il avait l’expérience d’entraîner au niveau international.

Tu as donc choisi UCLA pour l’excellence de sa section de volley.

Tout à fait !

La vie à l’Université de Los Angeles, c’est tout ce que tu peux voir dans les films.

Et c’était comment la vie dans cette université ?

C’est tout ce que tu peux voir dans les films.

Je ne rigole pas, les soirées de folies, les infrastructures impressionnantes, tout ça, c’est la réalité. C’était incroyable, j’ai tout aimé, c’est impossible de dire quoi que ce soit de négatif sur cette université. C’est un super endroit pour le volley et les études.

Cela a vraiment été bien de pouvoir étudier là durant 4 années. J’ai vraiment progressé sur la compréhension des systèmes, je me suis renforcé physiquement j’ai été meilleur au volley tout simplement en étant entraîné par John Speraw et d’avoir côtoyé de grands coéquipiers comme Micah Ma’a.

Micah Ma’a qui a joué à Poitiers et qui joue désormais en Turquie.

Oui tout à fait, je l’ai même eu avant-hier au téléphone.

Et quelle matière tu as étudié à UCLA ?

J’ai étudié la science politique. Initialement, je pensais faire de la physique, mais je me suis plus intéressé aux systèmes politiques, car ils donnent toujours l’impression qu’ils vont s’écrouler (rires). C’est vraiment quelque chose qui suscite mon intérêt notamment pour comprendre le monde qui nous entoure.

⇒ Kofi à UCLA

Avec UCLA, tu as joué la finale du championnat universitaire américain ?

Tout à fait, finale que nous avons perdue, un véritable crève-cœur.

Après tes études à UCLA tu décides d’arrêter le volley. Peux-tu nous expliquer pourquoi ?

A la base, j’adore autant le volley que la musique, mais à ce moment-là, par rapport à la musique, je ne pensais pas pouvoir concilier les deux.

Quand tu commences dans la musique, c’est essentiellement du réseau, il faut arriver à se mettre en avant sur internet.

J’avais besoin d’être sur Los Angeles afin de rencontrer les personnes incontournables pour produire mes chansons. Étant engagé là-dedans, ce n’était pas possible de jouer au volley à haut niveau car il n’y a pas de championnat professionnel en Amérique du Nord.

J’avais deux options à 22 ans, aller au bout de mon rêve et signer un contrat avec un label ou jouer au volley professionnellement immédiatement ce qui ne m’aurait pas permis de signer de contrat dans la musique. J’ai pris la première option, ce qui m’a donné la possibilité de signer pour produire mes chansons.

Tu es resté 4 ans dans cette situation. Pourquoi être revenu dans le volley de haut niveau comme professionnel ?

Parce que j’ai considéré qu’au stade où j’en étais dans la musique, cela m’était désormais possible de concilier les deux. Je connais désormais les personnes que j’ai besoin de connaître dans ce secteur et ce que je fais maintenant, c’est simplement créer des morceaux de musique. Cela, tu peux le faire depuis n’importe où. J’ai vécu à Toronto, à Los Angeles, en Floride, désormais je suis en Europe et j’ai compris que je pouvais le faire depuis n’importe quel endroit.

Il y a quelques mois, j’étais en Finlande aujourd’hui, je suis au bord de la Méditerranée à Sète et je peux continuer à faire de la musique.

Tu aimes ce style de vie, où tu changes d’endroit régulièrement pour découvrir de nouvelles choses et de nouvelles personnes ?

Oui, j’adore explorer et découvrir de nouvelles choses.

Finalement, le volley t’a aidé à réaliser cela.

Oui, le volley me permet de voyager. Le volley et la musique sont vraiment des composantes complémentaires de ma vie. Même quand j’étais centré sur la musique, j’ai continué à faire beaucoup de sport, de m’entraîner, si je ne m’entraîne pas, je deviens fou. Pour moi, c’est essentiel de pouvoir pratiquer le sport à haute intensité, cela m’aide, d’ailleurs, à développer la créativité dont j’ai besoin pour le côté musique.

Mon record en hauteur d’attaque est à 3m90.”

Tu nous as parlé d’entraînement, mais Kofi, dis-nous, la vérité sur ta hauteur d’attaque. On voit des choses sur internet mais, réellement, à quelle hauteur as-tu sauté le plus haut ?

(rire) Mon record en hauteur d’attaque, c’est-à-dire en prenant de l’élan, c’est 3m90.

Je ne l’ai fait qu’une fois. C’était avant les play-offs, mon entraîneur en Finlande voulait faire un peu le spectacle car là-bas personne n’avait vu cela. Il m’a dit, est ce que tu peux le faire devant les supporters, j’ai dit OK, je vais essayer de battre mon record. Avant le dernier match de saison régulière, ils ont mis l’appareil pour mesurer, j’ai tenté et j’ai touché à 3m90

Et tu t’es essayé sur le saut en hauteur ?

Non, je n’ai jamais essayé, il y a une question de technique, et je n’ai pas du tout cette technique.

Comment tu te sens au club depuis ton arrivée ?

J’adore l’équipe, j’apprécie tout le monde ici, les entraîneurs, l’encadrement, le président est incroyable, j’aime toute la famille de l’Arago ! Je pense que l’équipe peut être vraiment bonne et atteindre un super niveau.

Et le fait de de jouer dans le championnat français que tu découvres.

J’adore ce championnat.  La différence avec le championnat finlandais, c’est que tout le monde peut battre tout le monde. Ici chaque match, c’est une énorme bagarre, c’est incroyable de jouer ici, et c’est vraiment du super niveau.

Et au poste de central, tu as régulièrement de très gros joueurs à affronter. Est-ce que cela constitue un facteur de motivation supplémentaire pour justement encore progresser ?

Oui, il y a vraiment de super joueurs au poste de central, mais je n’ai pas besoin de cela pour avoir cette envie de progresser chaque jour. Ma motivation est vraiment personnelle, je n’ai besoin de personne pour avoir cette envie de travailler dur et de progresser au quotidien. Je veux juste être le meilleur joueur possible pour aider mon équipe à l’emporter.

Une fois qualifiés pour les play-offs tout peut arriver.

Pour le championnat, quels sont tes ambitions pour l’équipe ?

Je pense que nous pouvons battre n’importe qui. Nous avons largement les moyens de nous qualifier pour les play-offs et à partir de ce moment-là tout peut arriver.

Une fois qualifiés même si c’est pour affronter l’équipe classée première, pas de problème, je sais que nous pourrons la battre. Nous avons vraiment les moyens de faire ce que nous avons l’ambition de faire.

Tu connais le nom de joueurs canadiens qui ont joué à l’Arago avant toi ?

Oui, je connais Derek Epp, Gavin Schmitt, Graham Vigrass, une super contreur central, Steve Brinkman. Ça fait pas mal de très bons joueurs canadiens qui ont joué à Sète. (sourire)

Oui et quelque part avec Jesse (Elser), vous maintenez la tradition.

(rires) Oui c’est cela.

Quel est ton endroit favori à Sète ?

C’est l’endroit où il y a les rochers au-dessus de la crique de la conque. J’adore venir là et prendre le temps de regarder la mer. Bon après, j’adore Sète.

Merci aux supporters de l’Arago pour leur appui.

Quels mots tu voudrais dire aux supporters de l’Arago et aux personnes qui pourraient être intéressées par ta musique.

Déjà, merci beaucoup pour votre appui, cela représente beaucoup pour nous, et je pense pouvoir parler au nom de tous les joueurs.

S’il y a de jeunes joueurs de volley qui ont envie de venir échanger avec nous après les matchs, n’hésitez pas, cela sera toujours avec plaisir.

Et pour la musique ?

Mon album, c’est une fenêtre ouverte sur la culture musicale de Toronto, cela vous donnera une belle idée des influences et de ce que nous produisons dans ma ville et bien entendu, c’est mon meilleur album (rires)